Droit du travail à Dijon


Entraide familiale et contrat de travail : où sont les limites ?

L'entraide familiale est très fréquente dans les petites entreprises et les entreprises familiales au sein desquelles le chef d'entreprise va solliciter des membres de sa famille pour des prestations gratuites de travail ou de service.
 
Cette entraide va se caractériser par une aide ou une assistance solidaire effectuée de manière occasionnelle et spontanée, en dehors de toute rémunération, de toute contrainte et de lien de subordination. 
 
Elle se distingue du bénévolat, action par laquelle une personne apporte un concours non sollicité, spontané et désintéressé au profit d'une association humanitaire, caritative, culturelle ou d'oeuvre sociale sans but lucratif.
 
L’entraide familiale en tant que prestation gratuite de travail est en principe exclusive de toute notion de contrat de travail.
 
Pour autant, les liens de parenté ne sont pas incompatibles avec l'existence d'un contrat de travail.
 
Aussi, l'aide apportée ne doit être ni durable ou régulière, ni accomplie dans un état de subordination, ni se substituer à un poste de travail nécessaire au fonctionnement normal d'une entreprise ou d'une activité professionnelle. 
 
Si les relations entre les membres d'une même famille peuvent justifier une aide spontanée, désintéressée et libre, cette entraide familiale peut donc être requalifiée en contrat de travail dès lors que les critères du salariat sont réunis.
 
Etant précisé que toute personne qui a effectué la prestation peut toujours contester l’avoir fait au titre de l’entraide familiale et chercher à voir reconnaître l’existence d’un contrat de travail pour obtenir le paiement de salaires, le bénéfice d’une procédure de licenciement en cas de rupture et son assujettissement à la sécurité sociale.
L'entraide familiale doit dès lors s'exercer en dehors des règles applicables aux relations contractuelles conclues entre un travailleur et un employeur.

Pour qualifier la nature des liens qui unissent l'entreprise et la personne ayant effectué la prestation, les tribunaux apprécieront ce lien en tenant compte des conditions dans lesquelles la prestation a été effectuée par la personne et non par la qualification que les parties ont donné à leur relation étant souligné que le contrat de travail peut être reconnu même en l’absence d’écrit.

Entraide familiale et contrat de travail ( suite ) 

La frontière entre une relation de travail salariée et l’entraide n’est pas définie par la loi mais selon la jurisprudence elle résultera de la réunion de trois critères : une prestation de travail, sa rémunération et un lien de subordination, qui est le critère déterminant.

– une prestation de travail : Si aucune prestation de travail n'est fournie, il ne peut pas y avoir de contrat de travail. Mais le caractère occasionnel et spontané de l’aide apportée constitue un critère pertinent pour distinguer l’entraide du contrat de travail qui exige une prestation durable dans le cadre d’une activité organisée
– une rémunération en contrepartie de la prestation effectuée : Il s'agit de la contrepartie donnée à la prestation de travail ; elle peut être versée en argent ou en nature, ce qui signifie qu'elle n'est pas forcément d'ordre financier. Elle peut se trouver dans la réciprocité des services.
– un lien de subordination, à savoir un pouvoir de contrainte : Le lien de subordination est caractérisé par l'exécution d'un travail sous l'autorité d'un employeur qui a le pouvoir de donner des ordres et des directives, d'en contrôler l'exécution et de sanctionner les manquements de son subordonné.

Dans le cas de l’entraide familiale, les membres de la famille sont souvent sur même pied d’égalité, ce qui exclut tout rapport hiérarchique.

Ces conditions sont cumulatives, c’est-à-dire que la défaillance de l’une empêche que soit constituée l’existence d’un contrat de travail.

Selon les circonstances de fait, lorsque les relations d’aide s’institutionnalisent dépassant les conditions de l’entraide familiale, cette dernière peut être remise en cause et qualifiée d'activité salariée

Il convient d’ajouter qu’au delà de la simple requalification des relations en contrat de travail, le recours à la "fausse entraide" familiale est assimilé à un délit de travail dissimulé pour dissimulation d'emploi salarié.

Si l'entraide familiale est une forme spécifique de bénévolat permettant de faire participer les membres d'une même famille aux activités d'une entreprise ou à l'exercice d'une profession en faisant prévaloir les liens de parenté et la solidarité familiale, cette collaboration ne doit donc pas constitutive d'une dissimulation d'emploi salarié, ce que le Code du Travail interdit puisque toute personne liée à un employeur par un contrat de travail doit être déclarée.

S’il apparaît selon le cas considéré qu’une véritable relation de travail s’est instaurée entre les deux parties sans pour autant que l’employeur n’ait procédé aux formalités obligatoires énumérées par le code du travail, en toute connaissance de cause, l’infraction sera constituée, en dépit du lien familial existant entre les deux parties.

Pour autant nombreuses sont les juridictions qui à plusieurs reprises ont refusé d’admettre en présence d’un lien de parenté l’existence d’un contrat de travail considérant que le lien de subordination ne pouvait être retenu.

La jurisprudence a consacré une présomption simple d’entraide familiale, c’est-à-dire une présomption qui peut être renversée par la preuve du contraire.

Les juges emploieront la technique du faisceau d’indices pour déterminer dans quels cas se situer.

Les « coups de main » occasionnels justifiés par des liens familiaux, l'indépendance dans le travail de la personne qui aide, le non-remplacement de la personne en son absence sont autant de critères retenus pour déterminer que l’aide relève de l'entraide familiale. 

Quand un parent apporte son concours à l’entreprise d’un membre de sa famille, l’entraide familiale sera retenue tant qu’elle n’excède pas une certaine mesure, ne s’inscrit pas dans une régularité reposant sur un accord des parties et ne constitue pas un abus pour permettre de faire obstacle à l’application des règles du droit du travail.
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